Le blé transgénique : créé pour polluer

 
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OGM � Le blé transgénique : créé pour polluer

Professeur Joe Cummins, I.S.P. � e-mail : [email protected]

6 mars 2003

L' ISP = �Independent Science Panel� ou �Jury pour une science indépendante�, est constitué d'un ensemble de scientifiques impliqués dans de nombreuses disciplines et qui sont engagés dans la Promotion de la Science pour le Bien Public. Pour lire leur objet statutaire, tapez ici

Note : les nombres entre parenthèses (..) renvoient aux références bibliographiques qui sont données à la fin de ce texte.

Les plantes génétiquement modifiées actuellement sur le marché incluent le maïs, le soja, le colza (canola) et la pomme de terre. Les autres plantes alimentaires de grande importance, qui sont promues en vue d'une dissémination sur le marché mondial, comprennent le blé et le riz. A cause de son importance traditionnelle sur le marché mondial, le blé a été un centre d'intérêt pour les chercheurs en génie génétique .

Il y a eu un très grand nombre de champs d'essais de blé génétiquement modifié aux Etats-Unis et au Canada, la plupart d'entre eux ayant été conduits par la firme Monsanto qui a expérimenté des cultivars tolérants à des herbicides.

La présomption était que les essais et la distribution commerciale finale seraient évalués de façon à prévenir le genre de dissémination du transgène vers des blés qui n'ont pas été génétiquement modifiés et vers des plantes adventices (« mauvaises herbes ») comme cela a déjà été observé chez le maïs et le colza.

L'Agence Canadienne d'Inspection de l'Alimentation (CFIA) , un petit département de l'institution Agriculture Canada, a établi une distance minima de 30 mètres d'isolement (la séparation requise pour prévenir un flux de pollen transgénique vers des cultures proches de blés non génétiquement mofifiés) (1), tandis que le Service de l'Inspection de la Santé des Plantes et des Animaux (APHIS), l'organisme de régulation du Département de l'Agriculture aux Etats-Unis, a fixé la distance d'isolement à 33 pieds [environ 10 mètres ] pour les cultivars non hybrides, et à 660 pieds [environ 200 mètres ] pour les cultivars hybrides de blé (2).

Dans une étude récente de Waines and Hedge (3), et contrairement au point de vue généralement admis qu'un cultivar de blé est assimilable à une lignée pure, il a été démontré que des facteurs de biologie florale et des effets liés à l'environnement peuvent conduire à des flux de pollen jusqu'à un kilomètre d'une culture transgénique.

Mais le plus affligeant réside dans le fait que les observations rapportées dans les études publiées sur la mobilité du pollen sont antérieures à l'introduction du génie génétique au d&but des années 1970. Il n'y a pratiquement pas eu de publications, ou très peu, sur des études portant sur du pollen de blé à partir de marqueurs transgéniques. Malgré tout, il y a une preuve évidente, en utilisant des marqueurs génétiques traditionnels, q'un flux de gènes s'est produit de façon répétée et dans des lieux divers.

L'évaluation d'une contamination transgénique « acceptable » s'est centrée sur un chiffre autour de 1% de pollution qui a été considéré par l'appareil bureaucratique et les personnes chargées de la réglementation. Une limite « acceptable » de pollution autour de 1% est biologiquement inacceptable.

Chaque plante de blé produit en général 450.000 grains de pollen (3). Si vous semez 100 livres de semences par hectare et que chaque graine donne une plante, comme il y a 7.000 grains de blé par livre, ce 1% de plantes transgéniques est capable de produire plus de trois milliards de grains de pollen qui peuvent se disperser sur de vastes étendues.

Les pollutions des transgènes dans les champs de blés environnants peuvent provenir non seulement des grandes exploitations, mais également de toutes petites parcelles. La situation va bientôt ressembler à celle qui a résulté des cultures du colza (canola) [génétiquement modifié] dans l'Ouest du Canada, où des cultivars de colza non transgéniques ne peuvent plus être cultivés à cause du pollen transgénique qui s'est disséminé partout.

La dispersion du pollen et ses conséquences environnementales ont été discutées par Smyth, Khatchatourians and Phillips (4) et par Ho and Cummins (5) et la pollution transgénique prévisible et son impact économique ont été clarifiés.

En dépit de la preuve maintenant bien établie que la dispersion du pollen est désastreuse (et pendant que la dissémination par les animaux des pâturages et la fixation aux équipements de transport étaient complètement ignorées), les experts officiels de la réglementation se cramponnent à des estimations irréalistes de la diffusion du pollen qui sont basées sur des études anciennes et de nature scientifique douteuse et qui, de plus, remontent à la période antérieure à la technologie génétique moderne.

Ces mêmes experts, de même que les entreprises privées concernées, ont eu accès à des fonds copieux pour financer la recherche fondamentale requise afin d'étudier la pollution génétique ; cette recherche aurait dû précéder à la fois les expérimentations au champ et la commercialisation des cultures transgéniques. Cependant, de telles études n'ont pas été publiées et les agences de réglementation s'accrochent à l'utilisation de données sur la dispersion des pollens qui sont naturellement embarrassantes.

Ces données ne sont pas seulement employées pour les plantes alimentaires [génétiquement modifiées], mais elles sont aussi utilisées pour les plantes à usages pharmaceutiques dont les produits ont un impact à la fois sur les cultures alimentaires avoisinantes et sur la flore et la faune dans le milieu naturel.

Il est gênant que les officiels chargés de la réglementation aient permis (sinon assuré le développement) d'énormes mises en cultures de plantes transgéniques et qu'ils aient fait appel à des arguments erronés sur la dissémination et la pollution par les transgènes à partir de ces plantes [génétiquement modifiées] sans avoir mis en �uvre des études réalistes requises sur les cultures transgéniques elles-mêmes.

Cependant, si des agences telles que CFIA et APHIS complotent avec des entreprises privées pour polluer l'ensemble des cultures de blé afin de faciliter un passage rapide aux cultivars transgéniques, leur action est non seulement insensée, mais elle est diabolique.

Je ne crois pas qu'il sera possible de réformer les deux agences officielles concernées, car elles sont toutes deux ligotées par des conflits d'intérêts avec l'industrie des biotechnologies. Le seul remède valable à cette pathologie bureaucratique serait [de disposer de] deux agences véritablement indépendantes, libres de toute attache commerciale, et gérées par des scientifiques indépendants à l'abri de représailles.

Références bibliographiques

  1. Canadian Food Inspection Agency (CFIA) � APPENDIX 2: MINIMUM ISOLATION DISTANCES AND PERIODS OF POST-HARVEST LAND USE RESTRICTION� 2000 http://www.inspection.gc.ca/english/plaveg/pbo/dir/dir0007appe.shtml#APPENDIX%202

  2. The Animal and Plant Health Inspection Service (APHIS) �Table 1. Isolation Distances in Feet from Any Contaminating Source Adapted from Table 5, 7 CFR part 201.76� 2000 http://www.aphis.usda.gov/ppq/biotech/isolate Agricultural Biotechnology

  3. Waines,J and Hedge,S. �Intraspecific gene flow in bread wheat as affected by reproductive biology and pollination ecology of wheat flowers� 2003 Crop Sci. 43,451-63

  4. Smyth,S.,Khachatourians,G. and Phillips,P. �Liabilities and economics of transgenic crops � 2002 Nature biotechnology 20,537-41

  5. Ho,M. and Cummins,J. � Chronicle of An Ecological Disaster Foretold� 2003

ISIS report - 20/02/03 http://www.i-sis.org.uk

Traduction : Jacques Hallard, Ing.CNAM, consultant indépendant
Fichier : OGM ISP Frenchterm 05.10.2004
Adresse : 2240 chemin du Tilleul, F.13160 Châteaurenard
Courriel : [email protected]

L'article original en anglais peut-être consulté par les membres de l'ISP sur le site suivant :

https://www.indsp.org/Transwheat1.php

Rappel de quelques définitions et commentaires sur ce sujet :

APHIS : Animal Plant Health Service = Service de Santé Végétale et Animale aux Etats-Unis.

CFIA : Canadian Food Inspection Agency = Agence Canadienne d'Inspection Alimentaire.

Cultivar  : un ensemble homogène de plantes génétiquement stables qui proviennent d'une sélection orientée, qui correspond à des critères officiels d'homologation en vue de sa commercialisation et qui est destiné à une mise en culture en vue d'une production.

Génie génétique  : c'est une branche de la biologie moléculaire et de la biotechnologie. Il englobe les aspects théoriques et pratiques des techniques qui ont pour but d'isoler, d'analyser et de recombiner des gènes et de les intégrer dans des organismes vivants. Dans sa conception générale, le génie génétique recouvre toutes les méthodes, techniques et stratégies qui permettent d'intervenir sur le génome. Il implique des modifications orientées, ciblées et le transfert de molécules biologiques qui sont à la base du patrimoine génétique. Le génie génétique remonte à l'année 1973, quand les Américains Stanley Cohen et Herbert Boyer ont publié pour la première fois la modification d'une bactérie au moyen de techniques génétiques. Cette première expérience avait donné lieu à la transmission par génie génétique d'une propriété de résistance aux antibiotiques.

OGM  : O rganismes G énétiquement M odifiés (on dit également transformés ou transgéniques ). Nom donné à un être vivant issu d'une cellule dans laquelle a été introduit un fragment d'ADN recombiné, étranger. L'individu OGM qui en résulte, possède dans toutes ses cellules l'ADN recombiné étranger introduit au départ et intégré dans son patrimoine génétique. On parle par exemple de plantes génétiquement modifiées.

Pollution génétique : dissémination des caractéristiques d'une plante, qui peut-être génétiquement modifiée ou non, vers une autre plante de la même espèce par l'eau, le vent, le pollen ou un insecte. Le rayon de pollution génétique peut atteindre des distances variables selon les espèces et les conditions du milieu et cette pollution peut aller, dans certains cas, de plusieurs kilomètres à seulement quelques mètres.

Transgène  : séquences d'ADN intégrées dans le génome des plantes génétiquement modifiés.

Transgénèse ou t ransformation ou manipulation ou modification génétique = ensemble de manipulations qui consistent à intégrer de l'ADN recombiné d'origine(s) diverse(s) dans du matériel vivant receveur.

 

 
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